Voyage d’artistes, l’Italie s’invite à Versailles!
J&L Art et Culture
Nous vous emmenons aujourd’hui à la découverte de Versailles ! « Une découverte ? » vous direz nous, et bien selon son angle d’observation cela peut l’être ! Tous en carrosse, et à vos malles, c’est de voyage que nous parlons dans cet article, celui des artistes.
Du Quattrocento au XIXème siècle, les artistes ont suivi l’Italie comme modèle de création et d’étude. De la ruine antique aux grands maîtres de la Renaissance, ce fut un passage obligatoire pour s’affranchir des corporations d’artisans et devenir maître peintre ou sculpteur. La création de l’Académie Royale de peinture et de sculpture à partir de 1648, puis de l’Académie de France à Rome en 1666, a permis le financement de ce voyage pour les plus doués tout en recherchant à explorer un art français, volontairement « supérieur » à ce qui avait déjà été fait. N’est-il pas français de s’inspirer, débattre, analyser puis de considérer le résultat comme meilleur ? Vous en connaissez à présent l’une des origines : Versailles.
Louis XIV commande l’agrandissement du relais de chasse de son père, Louis XIII, en 1662. Il n’y habitera définitivement qu’à partir de 1682, mais le bâtiment sera déjà à un stade avancé des différents remaniements et changements de plans. C’est à la fois amusant et passionnant de constater cette emprise royale sur les arts, ainsi que le fourmillement d’artistes dans un même lieu, tous entièrement voués à la même tâche : rendre visible la grandeur du royaume tout en magnifiant la personne du roi dans son palais.
Pour ce faire, il a fallu qu’ils puisent dans ce qu’ils connaissaient de plus beau et de plus impressionnant, les églises et les palais romains, vénitiens et florentins. La chapelle de Versailles est peut-être l’exemple le plus marquant de l’influence italienne au château. Les trois artistes qui ont réalisé son plafond, Charles de La Fosse, Antoine Coypel et Jean-Baptiste Jouvenet, reprennent des idées picturales majestueuses empruntées aux italiens. Tout comme Gaulli à l’église du Gésù, Andrea Pozzo à l’église Saint-Ignace à Rome ou encore l’Assomption de la Vierge du Corrège à Parme, on peut voir à Versailles des trouées de ciel avec des personnages s’élançant vers le divin doré. Ces fissures nous apparaissent comme des apparitions divines inattendues grâce à l’utilisation de la quadratura, c’est-à-dire un trompe l’œil magistral où la sculpture et l’architecture sont en réalité peinture, le trompe-l’œil a ainsi atteint des sommets de perfection. Mais attention, ici jésus et Dieu ne s’élancent pas l’un vers l’autre, il est hors de question de tourner le dos au roi, on l’élance vers le soleil !
Passez votre souris sur les plafonds pour agrandir les détails! 🔎
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Pourquoi dit-on que le plafond de la chapelle est de style français ? Parce que les peintres ont conservé la vivacité de la couleur de Véronèse ou du Titien et le talent des artistes romains tout en enlevant le superflu de personnages et de grandiloquence baroque. Versailles instaure alors un style dit « classique ». L’ordre dans toute chose, aussi bien que même dans les jardins, le roi contrôle notre mère Nature avec « le jardin à la française ».
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En vous aventurant un peu plus profondément dans le château, vous rencontrez l’Appartement d’Apparat du roi, où les plafonds s’inspirent de divinité romaine, mais également des planètes. C’est le grand peintre du roi, Charles Le Brun qui en a conçu le programme, en s’inspirant de celui du palais Pitti à Florence, peint par Andrea Pozzo. Différentes modifications, à travers les XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles, ne nous permettent plus d’admirer toutes les salles d’origines, mais le salon d’Apollon nous laisse un parallèle assez évident à faire. À Versailles, il y a néanmoins une délicatesse plus affirmée grâce à l’évacuation des figures subsidiaires et d’un effet moins tourbillonnant, plus centré sur l’effet général de la lumière.
C’est également ce qu’il se passe dans la merveilleuse galerie des Glaces. Inspirée par la galerie du palais Farnèse à Rome, peinte par Annibale Carracci au début du XVIIᵉ siècle, Le Brun décloisonne ses peintures pour inventer une lecture libre. Les 18 premières années glorieuses du règne de Louis XIV sont sous vos yeux sans ordre chronologique, mais vous invitant à vous déplacer pour les découvrir. Le roi est là, ce n’est plus Apollon ou Hercule, il est lui-même dans toute sa magnificence.
Que l’on admire ou pas le règne du roi soleil, Versailles ne peut pas laisser indifférent son visiteur. C’est ici que la France a affirmé son talent artistique, que l’élève a dépassé le maître. L’Italie est restée, pour tous les artistes du monde, un voyage incontournable pour l’apprentissage des bases de l’art et le château de Versailles est un tournant dans l’histoire de l’art français. Alors, pourquoi ne pas parsemer votre vie d’un peu de voyages et de visites ? Faites-vous plaisir, c'est bon pour la culture !
Jessica